Campagne Résilience : Scientifiques en zones de front

La campagne océanographique Résilience se déroule dans l'océan Indien du 19 avril au 24 mai 2022. À bord du navire Marion Dufresne, une cinquantaine de scientifiques internationaux, menés par Jean-François Ternon, chercheur de l'Institut de recherche pour le développement (IRD) à l'UMR Marine biodiversity exploitation & conservation (MARBEC), étudient les interactions entre la physique et la biologie à “petite échelle”. Les scientifiques se rendent sur les zones de front en bordure de tourbillons dans le canal du Mozambique et sur la côte est de l'Afrique du Sud.

Les scientifiques de France*, d'Afrique du Sud (trois universités - Qqeberha, Cape Town, Stellenbosch), du Mozambique, du Royaume-Uni et des États-Unis impliqués dans la campagne Résilience accueillent, en parallèle, une Université flottante composée de vingt étudiants et de deux encadrants des universités de Bretagne Occidentale (UBO), du Littoral Côte d'Opale (ULCO) et de Côte d’Azur (UCA).

 Le rôle des tourbillons

Sur des zones de front en bordure de tourbillons méso-échelle (~100 km), nombreux dans le canal du Mozambique, la campagne Résilience étudie les interactions à petite échelle (~1-10 km). Bien décrits par la modélisation mais difficiles à observer en mer, les processus physiques à petite échelle ont une incidence sur la productivité biologique et la structuration des écosystèmes pélagiques. Des mesures couplées des différents paramètres permettront de comprendre leur rôle. Les zones de front sont souvent le lieu d'agrégation de poissons, oiseaux et mammifères marins. Dans le contexte de changement climatique, il est prédit que l'intensité de ces fronts varie dans le futur avec des conséquences possibles sur ces écosystèmes.

 “Les résultats de la campagne contribueront donc à une étude des conséquences de ces changements sur les écosystèmes exploités de la zone (problématique de la sécurité alimentaire pour les pays riverains)”, explique Jean-François Ternon, chercheur de l'Institut de recherche pour le développement (IRD).

 Une analyse en temps réel

La zone géographique échantillonnée sera le centre du canal du Mozambique et la côte est de l’Afrique du Sud. On y rencontre en effet des structures tourbillonnaires marquées, dans des contextes hydrodynamiques contrastés (nombreux fronts au centre du canal du Mozambique, interactions tourbillons - côte au nord de la côte est d’Afrique du Sud, tourbillon semi permanent au sud de Durban, localisé entre la côte et le Courant des Aiguilles). Les tourbillons étudiés étant par nature des structures mobiles, le plan d’échantillonnage sera adapté en permanence par une analyse en temps réel des données satellite (altimétrie, couleur de l’eau) réalisée à bord.

 Par essence, Résilience est une mission internationale pluridisciplinaire qui couvre une grande diversité de mesures en mer. “Des thématiques additionnelles seront abordées pendant la campagne : analyse des métaux traces en surface, observation des oiseaux et mammifères marins - depuis le bord et à l’aide de dispositifs en vol, mesures d’ADN environnemental, mesure des paramètres du cycle du CO2, étude de la connectivité biologique (zooplancton) au large de l’Afrique du Sud, radiosondage atmosphérique”, complète Pierrick Penven, chercheur de l'IRD au laboratoire d’océanographie physique et spatiale (LOPS) et co-chef de mission.

 La capacité d’accueil du Marion Dufresne permet de proposer la réalisation d’une Université flottante (UF). Celle-ci complétera le volet formation de la campagne qui accueille par ailleurs plusieurs étudiants (master, thèse, post-doc) faisant partie de la cinquantaine de scientifiques embarqués, notamment des étudiants issus des pays de la zone d’étude (Afrique du Sud, Mozambique, Maurice, Réunion).

 Vivre une expérience scientifique grandeur nature

Vingt étudiants en master de trois universités françaises − Université de Bretagne Occidentale (UBO), Université du Littoral Côte d'Opale (ULCO), Université Côte d’Azur (UCA), membres du réseau des universités marines (RUM), rejoindront également l’équipe scientifique de la campagne Résilience pour prendre part à l’opération Université flottante.

L’objectif est d’offrir aux étudiants issus de diverses disciplines concernées par la recherche menée durant la campagne Résilience (chimie, biologie, écologie marines ou encore sciences de la conservation) la chance de vivre une expérience scientifique grandeur nature, au plus près des chercheurs, en bénéficiant de leurs expertises respectives et en les accompagnant au quotidien lors de cette expérience en mer.

Les étudiants sont encadrés par un enseignant-chercheur et une ingénieure de recherche de deux des trois universités adhérentes (UCA et UBO) dédiés exclusivement à l’encadrement pédagogique, la coordination des activités à bord des étudiants de Master, en harmonie avec l’équipe scientifique et l’équipage, et en relation directe avec un enseignant-chercheur issu de la troisième université adhérente (ULCO) faisant partie de l’équipe scientifique.

Outre la participation active aux activités de recherche scientifique pendant la campagne Résilience, les étudiants assureront en grande partie la communication à bord et vers le grand public, à travers l’organisation de séminaires scientifiques, de restitution quotidienne des activités à bord et de synthèses sur les méthodes, les outils utilisés et les métiers à bord.

À travers la participation aux activités de recherche et la mise en valeur du travail des scientifiques sur le bateau sur les réseaux sociaux, les étudiants de l’Université flottante contribueront ainsi au déroulement et à la visibilité de cette campagne. Deux étudiantes de l’Université Nelson Mandela, membres de l’équipe scientifique, ont d’ores et déjà rejoint le projet Université flottante.

 

*MARBEC, ENTROPIE, LEMAR, LOCEAN, LOG, LOPS, MIO

 

La campagne est en partie financée par le programme Ocean Front Change du Belmont Forum. Les autres sources de financement sont actuellement les programmes « Les enveloppes fluides et l’environnement » (LEFE - CNRS), l'École universitaire de recherche ISblue, la Flotte océanographique française opérée par l'Ifremer, ainsi que la National Research Foundation (NRF) en Afrique du Sud.